fbpx

Prendre le risque d’être soi

Il y a quelques semaines, j’ai assisté à un débat passionnant, intitulé «Au risque d’être soi», présenté au théâtre montréalais Aux Écuries. Il y était beaucoup question d’identité et la phrase de Cathy Wong : «Le risque d’être soi, c’est le risque d’être seul(e)», a beaucoup résonné en moi. D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu cette impression d’être «différente», au point de remettre mon identité très souvent en question.

J’ai grandi dans une ville de province française de laquelle je n’étais pas originaire, contrairement à 90% de mes petits camarades, et où j’étais l’une des rares, voire la seule enfant de mon âge avec une maman monoparentale, et même «pire» : qui avait divorcé.

J’ai donc vécu une grande partie de mon enfance et de mon adolescence avec la désagréable sensation d’être une étrangère. Des années plus tard, j’ai connu la réalité de l’immigration. Au Québec, j’ai compris rapidement que je serais vite identifiée comme «Française». Moi qui avais quitté l’Hexagone, car je ne m’y sentais pas à ma place, voilà que mes origines me collaient non seulement à la peau, mais pouvaient même se retourner contre moi, surtout lorsqu’on y ajoutait le qualificatif «maudite».

Tannée de ce constat, je suis allée voir ailleurs. De fil en aiguille, je me suis retrouvée au Sénégal où j’ai compris l’impact de la couleur de la peau. J’étais alors blanche, un état jusque-là naturel et auquel je ne prêtais aucune attention.

Différente dans la diversité

Je suis finalement retournée m’installer à Montréal, ville dans laquelle je me sens à ma place notamment grâce à sa diversité. Je ne me sens pas Québécoise ou Canadienne pour autant. De toute façon, même pour mes amis canadiens venus d’autres provinces, la question revient sans cesse : «Mais tu viens d’où?» A contrario, lorsque je suis en France, mon entourage me lance régulièrement «Vous, au Canada…»

S’assumer pour mieux s’entourer

La question de l’identité m’a longtemps taraudée. Jusqu’au jour où j’ai décidé que mes origines ne me définissaient pas. Oui, elles participent en partie à mon identité, mais je ne suis pas «seulement Française» comme je ne suis pas «juste une femme». Je suis avant tout un être humain, avec ses bons et ses mauvais côtés, ses bons et ses mauvais jours. Bref, je suis juste «moi».

C’est en réalisant que je devais faire la paix avec ce qui m’avait construite que je pouvais m’accepter, et m’affirmer. On ne peut pas empêcher l’autre ou les autres de mettre des étiquettes sur notre front ou de vouloir nous mettre dans des boîtes. Appartenir à une minorité ou une majorité est relatif au milieu et au contexte dans lequel on évolue. Je peux être minoritaire au milieu de mes amies mamans et majoritaire dans une assemblée de femmes ou… de Françaises !

Toutefois, j’ai remarqué que les personnes qui assument totalement leur personnalité sont souvent bien entourées. J’ai compris que plus on assume qui on est réellement, plus on prend le risque d’être seul(e), oui, puisque notre attitude ne vise pas à plaire aux autres, mais aussi à s’entourer de personnes partageant les mêmes valeurs que nous.

Et j’entretiens l’espoir secret que si chacun ose être soi un peu plus chaque jour, nous pourrons ensemble contribuer à la construction d’une société ouverte d’esprit.