La famille Plante-Beauregard l’a fait
À l’été 2011, Nadia et Jean-François ont décidé de plier bagage pour tenter l’aventure de vivre en région éloignée pendant un an avec leurs enfants alors âgés de 5 semaines, 3 et 5 ans. Les inspirés sont allés à la rencontre de cette famille qui a fait le choix de vivre une odyssée là où s’arrête la route.
Comment se prépare-t-on pour un tel périple avec de jeunes enfants?
« Quand mon conjoint m’a fait part de son intention d’exercer son métier d’infirmier à Chevery en Basse-Côte-Nord, je lui ai dit que c’était le moment parfait pour le faire, puisque j’étais en congé de maternité.
Nous avions déjà l’expérience des déménagements (Laval, Québec et Lévis). Mais, avant de poser nos valises définitivement à Lévis, nous voulions vivre une expérience dans une contrée reculée.
Pour réussir un tel périple, le mot d’ordre est « préparation », surtout avec des enfants en bas âge. En effet, pour pallier la problématique du ravitaillement, car les denrées nous parviennent soit par avion ou par bateau, il était vital pour nous de prévoir l’essentiel pour vivre pendant un an : du lait maternisé ainsi que des couches lavables pour notre bébé, des vêtements et de la viande en quantité suffisante. »
Comment s’est passée votre arrivée?
« Quand nous sommes arrivés à Chevery, un dimanche soir, les restaurants et les commerces étaient fermés. Les enfants n’avaient donc rien à manger. Et comble de malchance, nos effets personnels ont été accostés à Harrington Harbor, l’île voisine. Au moins, le centre de santé nous a fourni un logement meublé, ce qui nous a permis de dormir même si nous n’avions pas de draps.
Comment avez-vous vécu l’adaption à votre nouvel environnement?
« On avait l’impression d’avoir été transportés à l’époque de nos grands-parents. Chevery est un monde totalement à part. Par exemple, les personnes décédées sont installées, pendant deux jours, dans une boîte en bois à l’église, car il n’y a pas d’embaumeur.
En hiver, les routes ne sont pas entretenues. La motoneige est le seul véhicule utilisé.
À propos d’hiver, ils sont vraiment très rudes. Nous avons eu une tempête de neige un 5 octobre, le jour de l’anniversaire de notre fils aîné. Nous n’avons pas eu d’électricité pendant une semaine. Du jamais vu pour nous!
Pour que nos enfants gardent leur chaleur, nous avons installé notre bébé de trois mois dans une valise remplie de couvertures et les deux autres dans un garde-robe. Heureusement que le centre de santé a pu nous fournir une génératrice pendant l’absence d’électricité. Ce souvenir nous fait maintenant rire!
Outre ces embûches, nous gardons en mémoire la générosité des habitants de ce petit village. Il est plus important de venir en aide à son voisin que d’arriver à l’heure à son travail. Je me souviens de l’épisode où la maison d’une famille d’un village voisin a pris feu. Les habitants ont pris l’initiative d’organiser des pot lucks pour amasser des fonds. Ce geste nous a beaucoup émus et nous a transmis une belle leçon de vie sur le fait de prendre le temps de ralentir pour aider son prochain.
Du temps de qualité
« Nous avons profité de nos deux semaines de vacances tous les trois mois pour partir à la découverte de notre environnement et surtout pour rendre visite à nos familles respectives, qui nous manquaient beaucoup. »
Du côté des enfants
« Ils ont vécu la même aventure que nous, mais avec leurs yeux d’enfants. Mon fils aîné a commencé l’école à Chevery dans une classe française, mais il a dû s’adapter à un environnement anglophone et à parler à ses amis dans une langue différente de la sienne. »
Retour à la réalité
« Nous avons longuement hésité avant de revenir, mais finalement nous avons choisi de suivre le plan initial, soit de retourner à Lévis au bout d’un an. Vivre en reclus n’est vraiment pas facile pour plusieurs points dont celui de recevoir une nourriture périmée ou en quantité rationnée. On se rend compte de la chance de pouvoir choisir ce que l’on mange une fois que l’on n’y a plus accès.
Toutefois, nous avons eu le privilège de rencontrer des personnes dévouées et généreuses qui ont eu une influence positive sur la manière dont nous voulons élever nos enfants. Cette expérience nous a permis d’apprécier le moment présent et de ralentir.
Parfois, nous pensons retourner là-bas pour profiter de la simplicité de la vie. Cet endroit nous manque vraiment. Mais, nous préférons plutôt nous bercer de ces bons souvenirs, puisque nous avons trouvé en Lévis l’endroit où élever nos enfants. Nous sommes ensemble, heureux en famille, et nous apprécions les petits moments de bonheur quotidiens ».