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Tout ce qui peut éclore d’un brin de muguet

J’ai toujours aimé écrire. Mais l’essentiel de ma créativité rédactionnelle est aujourd’hui tourné vers mon emploi et principalement dédié à mes fonctions de responsable des communications. Si bien que, lorsque j’essaie d’aller puiser de l’inspiration au fond de moi pour écrire quelque chose de plus personnel, j’ai parfois l’impression que la source s’est tarie. Ou plutôt que le muscle dédié au développement de mon imagination féconde générant une écriture intuitive et inspirée manque sérieusement d’entraînement. Bref, la mécanique est quelque peu rouillée.

Cependant, à la lecture de plusieurs billets sur les blogues des Inspirés, du Guide pour la survie de la jeune adulte responsable ou, dans un autre genre, de Where is my office now?j’ai vraiment eu un élan supplémentaire et l’envie de m’y remettre ou au moins de m’y risquer. Alors, me voilà, fébrile.

La joie dans l’infiniment petit

L’écriture automatique étant moins évidente qu’auparavant, je me suis créé un exercice ludique pour faire surgir des choses intimes, pour creuser un tunnel au fond de moi et en retirer ce qui m’anime, ce qui m’allume. Concrètement, j’ai pris en main mon joli carnet, vierge depuis trop longtemps, à la couverture magnifiquement illustrée par Pascal Blanchet (Le Noël de Marguerite, Nocturne…) et j’ai décidé d’y consigner tout ce qui me procure des émotions dans la vie, tout ce qui, dans l’infiniment petit, me transporte de joie.

J’élaborais mon processus de création tel un chorégraphe faisant des exercices d’improvisation pour faire émerger l’essence de son œuvre en devenir, en prenant d’autres chemins, en faisant des détours plus ou moins sinueux. Rendue là, j’étais certaine que, même si le processus avait des chances d’être plus intéressant que mon texte final, j’étais en train de souligner et définir ma vision du bonheur. Quel luxe et quel plaisir de prendre le temps de remarquer toutes ces sources d’enchantement qui infusent pleinement notre quotidien, à condition de leur prêter attention et de savoir les apprécier.

Au sein de cette énumération, assez longue et inachevée, de petits plaisirs simples et non coupables qui peuvent me transporter au paradis des sens, j’ai noté, entre autres et dans le désordre : écouter le grésillement d’un disque vinyle de jazz sur un tourne-disque, sentir sous mes pieds le moelleux d’un sentier de randonnée dans la forêt, apprécier la douceur de la peau de l’être aimé, être touchée par une note de clarinette basse, boire un verre de cabernet franc du Val de Loire, se réveiller dans notre Westfalia au milieu des montagnes, au bord du fleuve ou face au fjord, sentir l’odeur du lilas au printemps, observer la Voie lactée jusqu’à s’y perdre… etc.

La contemplation des brins de muguet

Dans cette liste bien personnelle, mais peut-être pas tant, figurait aussi la contemplation des brins de muguet au mois de mai d’un bord de l’Atlantique ou au mois de juin de l’autre côté. J’ai toujours été très émue (le mot est fort mais il s’agit vraiment de ça) par cette plante éphémère qui voit éclore des fleurs au parfum délicat en forme de clochettes splendides et fragiles à la fois. Il me semble y voir là une métaphore de la vie. Les attributs « éphémère, délicat, splendide et fragile » s’y appliquent à merveille.

Il est pourtant facile de passer à côté de la très courte période de floraison du muguet et donc de manquer tout ce qu’il peut avoir à offrir. Mais si on ralentit, si on apprend à développer un regard curieux et attentif, je suis convaincue qu’on peut y voir toutes les beautés du monde et en retirer un profond bonheur, ajouté à une généreuse dose d’enthousiasme, relevé par un soupçon d’espoir et une pincée non négligeable d’émerveillement.

La qualité — et la puissance métaphorique — de cette petite fleur, telle une étincelle pouvant allumer de grands feux intérieurs, devient alors la meilleure arme contre le cynisme et le désenchantement du monde. Et bonne nouvelle, le muguet refleurit chaque année!