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100 lectures inspirantes : L’aveuglement, José Saramago

Aujourd’hui, je vous présente L’Aveuglement de José Saramago, une œuvre d’une beauté incroyable de par son style, mais surtout, une lecture qui soulève des questions et ouvre littéralement les yeux. 

Extrait

« Une demi-douzaine de mots de ce genre était constamment utilisée par les grands moyens d’informations qui finissent toujours par former le vœu pieux que les infortunés aveugles retrouvent promptement leur vue perdue, et en attendant ils leur promettaient la solidarité de l’ensemble du corps social organisé, tant officiel que privé. Dans un passé lointain, des raisons et des métaphores analogues avaient été traduites par l’optimisme hardi des gens du commun en dictons comme celui-ci, Les jours se suivent et ne se ressemblent pas, ou dans une version plus littéraire, De même qu’aucun bonheur ne dure éternellement, de même malheur finit par cesser, maximes suprêmes de qui a eu le temps de tirer la leçon des revers de la vie et de la fortune, et qui, transplantées dans le pays des aveugles, devront se lire comme suit, hier nous avons vu, aujourd’hui nous ne voyons pas, demain nous verrons. »

Pour faire court

Une ville anonyme est frappée par un étrange mal : les habitants deviennent subitement aveugles. Pourquoi? Comment? Nul ne le sait. Devant l’ampleur de la situation, les autorités décident de parquer tous les malades en un endroit pour éviter la propagation de la maladie. Une personne semble être épargnée, la femme de l’ophtalmologiste, qui choisit de suivre son mari, atteint de la maladie. Nous assistons donc à l’organisation de la vie dans le camp des aveugles, des débuts chaotiques, tragiques parfois même, jusqu’au dénouement positif lorsqu’après être retournés dans une ville ravagée, ils retrouvent la vue.

En un mot : Aveuglement?

Nous sommes une société déjà aveugle, nous dit le seul personnage du roman qui n’est pas touché par la cécité. Dur constat. À l’heure des écrans et de l’information instantanée, l’Homme n’a jamais eu autant de possibilités de « voir ce qui se passe » dans le monde et de communiquer. Mais nous sommes une société aveugle face aux choses vraies, aux valeurs universelles; résultat de l’établissement de normes sociétales, et résultat de l’oubli des relations humaines au profit du paraître. Voir les inégalités, mais ne rien faire, c’est être aveugle; voir l’autre, mais ne pas lui prêter attention, aussi. Nous voyons à travers le filtre de notre ordinateur, à travers le filtre des médias qui ont déjà mâché l’information transmise, à travers le filtre du gouvernement qui nous fait croire ce que nous voulons entendre.

En matière d’aveuglement, on pourrait utiliser le mot passivité. C’est bien beau de dire tout ça, me rétorquerez-vous. Je ne me veux pas détentrice de la vérité, mais savoir où se situe le problème, c’est déjà y remédier partiellement. Recouvrer la vue, c’est possible en faisant preuve de proactivité : s’éveiller aux autres, à leurs différences et à leurs faiblesses pour ainsi entendre les différents sons de cloches. Douter aussi de ce que l’on sait. Loin d’être un défaut, c’est une façon de cheminer vers la vérité, en s’informant, en acquérant des connaissances. Tout cela nous permet aussi d’éviter de devenir un mouton, de faire ressortir nos différences, ce qui nous rend uniques. L’espoir est là, une lueur, certes, mais qui grandit en chacun de nous. Nos yeux sont le reflet de notre âme, il est temps de les garder ouverts et de prouver au monde qui nous sommes.

Bonne lecture!