I ALMOST BLEW MY TED TALK (POUR VRAI).
Dans notre imaginaire collectif, être conférencier à Tedx,
c’est l’équivalent de vivre son 15 minutes de gloire.
Mais que faire lorsque ça ne se passe pas comme ça?
En arrivant chez moi, j’ai tapé un peu désespérément dans Google : I totally blew my Ted Talk. À ma grande non-surprise, je n’ai pas trouvé grand chose, à part une cinquantaine de liens qui disaient exactement le contraire (This Ted Talk Blew Me Away!) et cet article, qui, je l’avoue, m’a fait un peu de bien sur le coup… même si c’est évident que l’auteure a pris soin de conclure avec une note qui ne lui ferait pas perdre la face dans cet imaginaire collectif (gloire!).
LE CAUCHEMAR EN ACCÉLÉRÉ
Je vous dis que ça n’a pas été long à analyser dans ma petite tête. À peine étais-je sortie de scène (ou peut-être étais-je encore dessus?) que je savais ce qui venait de se passer : j’ai gelé, j’ai sauté des bouts, je me suis perdue dans mes idées, j’ai oublié mon histoire, j’ai été déconcentrée par le PowerPoint et l’ordre qu’il suggérait, j’étais trop dans mon égo, trop dans ma tête, je voulais trop être bonne, je me suis déconnectée de mon coeur, de mon message, je pensais juste au fait que me jupe descendait et que ce n’était pas chic du tout, j’ai pas eu ma leçon le jour où j’ai été critiquée (traumatisée) sur vidéo par mon prof de relations de presse et ses amis faux-journalistes agressifs, j’ai pas assez pratiqué, non mais à quoi j’ai pensé de m’embarquer là-dedans 4 mois après avoir accouché? J’avais sous-estimé le temps que j’aurais pour me préparer avec un bébé. J’ai été naïve de penser qu’avoir quelque chose à dire était suffisant. NAÏVE de penser que TEDx c’était vraiment pour monsieur et madame Tout-le-monde. NAÏVE. Non pas naïve. INNOCENTE. Maudite innocente.
Ouin, je sais, c’est pas beau. Je sais aussi ce que vous allez me dire : « ben non, tu es trop dure avec toi-même, c’était bon, tu as été courageuse, tu te mesurais à des professionnels de l’art oratoire, etc. » Non non non, arrêtez. Vous êtes bien généreux et ça me réchauffe le coeur, mais ce n’est pas pour vous soutirer des bons mots et réparer mon orgueil que j’écris ce billet.
IT WASN’T ABOUT ME
Objectivement et avec 2 mois de recul, je sais que ça n’a probablement pas été si pire que ça. Parce que ce Ted Talk là, quoi qu’en pense bien du monde et en particulier l’imaginaire collectif qui proclame au statut de vedette les conférenciers TED… ce TED TALK là : It wasn’t about me. Il ne servait pas à me mettre en vedette. Je n’étais pas le sujet de ma conférence.
Quand a germé l’idée folle de m’inscrire au prochain TEDxQuébec, j’étais assise dans la salle du Périscope en novembre 2012. Je venais de décider qu’en 2013, mon désir était de prendre ce qu’il y avait à l’intérieur de moi et de le partager avec le monde. Je me souviens de m’être dit, au moment où j’applaudissais la fin des conférences et lisais en arrière-plan le slogan officiel : ideas worth spreading, que moi aussi j’avais quelque chose à dire. De vrai, d’humain, de réconfortant, d’inspirant. Juste pour que ceux qui soient là se disent : « Eh que ça fait donc du bien à entendre, ça! » Comme c’est le cas avec la plupart des conférences TED. Bon, plus tard j’avais pensé écrire un livre à la place, mais après il y a eu la création des Inspirés et tout ça s’est comme emboîté, dont la métaphore des morts-vivants qui m’est venue à l’idée en pleine période d’inscription pour les conférenciers et puis boom, même avec la grosse bedaine en plein milieu des boîtes de déménagement, j’ai appuyé sur envoyer.
LA VULNÉRABILITÉ, L’AUTHENTICITÉ ET WALKING THE TALK
Il y a maintenant la journée internationale de l’échec. Collectivement, c’est de plus en plus encouragé de célébrer nos rendez-vous manqués avec le succès. Malgré ça, nos faux pas et la déception qui les accompagnent sont toujours difficile à avaler, du moins sur le coup. Je pense que c’est juste humain.
C’est paradoxal toute cette panique face à mes (trop grandes?) attentes déçues et à mon image, avouons-le, parce que je suis la première à encourager tout le monde à être soi-même, peu importe ce que ça implique. À dire que se montrer vulnérable à la face du monde, c’est être bien plus fort que de se montrer fort et en contrôle tout le temps. Que ce qui crée des connexions authentiques, c’est le fait de se montrer tel que l’on est, avec toute notre humanité.
C’est pas rien là, j’ai dit mot pour mot dans ma conférence : « Pour passer du monde des morts-vivants au monde des Inspirés, ne vous souciez pas trop de ce que les autres pensent de vous. » Ahem. Pire. « Oubliez la notion de succès. » Re-Ahem. Et moi qui capote de ne pas avoir été à la hauteur des attentes de l’imaginaire collectif. Ou peut-être que j’aurais dû changer la phrase dans ma conférence pour : « Ne vous souciez pas trop de ce que pense votre Égo… » Ah! cet égo qui nous torture les entrailles avec la honte. Ouch!
INCEPTION
Heureusement, il y a eu de ces gens qui sont venu me dire : « Je me suis reconnu dans ce que tu as dit. » À ceux-là, je dis merci. Merci de m’avoir fait me reculer de mon nombril pour me souvenir de la raison pour laquelle je m’étais embarquée là-dedans. Merci d’avoir remis les choses en perspective.
« Tremblez, mais osez quand même » aurait pu être le titre de ma conférence si cette expression n’avait pas été rendue célèbre par un baby-boomer avant moi. N’est-ce pas ce que j’ai fait, après tout? Incarner exactement dans cette conférence-qui-ne-va-pas-comme-je-l’aurais-voulu l’essence de mon message? Woah! Si c’est le cas, je suis peut-être prête à accepter que ça se soit passé comme ça.
ÉPILOGUE
La question, donc, est : vais-je oser remonter sur scène? La réponse : ouais, probablement. Malgré le fait que je ne sois pas une entertainer ni une oratrice née, j’ai plusieurs fois pris la parole en public. Parfois pour me dépasser. Parfois pour me forcer à sortir de l’ombre. Parfois parce qu’il n’y avait personne d’autre pour le faire. Toujours parce que j’avais quelque chose à dire qui me tenait à coeur et me brûlait les lèvres.
Parfois ça a bien été. Parfois ça a été correct, limite, naturel, trop intense, désastreux pour mon égo, inspirant, vrai ou maladroit. Ça serait sûrement mentir de dire que je ne prendrai plus le micro d’ici la fin de ma vie, mais non, devenir une conférencière-vedette n’est pas inscrit à ma bucketlist (il y a donc bien des mots anglais dans mon texte, il n’y a pas d’équivalent francophone pour ça?).
D’ailleurs, la prochaine fois que je vous dis que j’ai quelque chose à dire, suggérez-moi d’écrire un livre à la place. Ok?
Vous pouvez voir ce dont je parle en regardant ma non-performance en vidéo ici. Mais encore mieux, vous pouvez lire mon script officiel juste ici. Ma présentation est également disponible sur slideshare.