fbpx

2017 : Anti page blanche

Minuit moins quart, le 31 décembre.

J’étais dans une chambre d’hôpital au CHUL avec un bébé branché sur un saturomètre dans les bras – sous observation pour un gros rhume s’étant transformé en infection aux bronches. Rien d’alarmant, juste un bizarre de timing.

Je venais de manger des sushis et une amie m’avait apporté une petite bouteille de mousseux et des beignes maison pour rendre le tout un peu festif. Mon chum et moi avions chatté sur Facebook nos souvenirs et moments forts de 2016 et il était parti se coucher – exténué de la nuit précédente passée à veiller bébé.

Le bébé, lui, dormait dans mes bras et je regardais l’horloge de la chambre plongée dans la pénombre avec dans la main, mon iPhone allumé sur une note evernote entamée il y a plus d’un mois : 2017.

Des lignes et des lignes. Des intentions. Des mots-clés. Des idées de projets. Des réponses à la question : «comment je veux me sentir?»… 

À ce moment précis, une partie de moi était plutôt zen : après tout, le thème que j’avais choisi était «Permettre». Permettre à la vie de se présenter telle qu’elle se présente. Me permettre de suivre la vague, de composer avec les circonstances et d’en tirer le maximum sans arrière-pensée pour le plan, l’idéal ou les principes que j’avais initialement en tête. La vie m’avait pris au mot, tsé. C’était comme réconfortant dans un sens. Je m’entendais penser : «Pfff, je vais le relever ce premier défi.»

Mais ce mot, Permettre, je l’avais choisi pour son double sens. Il signifiait aussi de permettre à mes rêves enfouis et à quelques désirs récurrents de prendre forme. Leur créer de l’espace. Leur dédier de l’énergie. Du temps. Dire non aux distractions. Ne plus les résister. Pis quand j’y pensais, je sentais comme une petite vague de stress. Minuit approchait. Étais-je prête? Étais-je vraiment prête? 

J’avais l’impression qu’il me restait encore trop de pensées dont je devais me débarrasser avant de l’être vraiment, trop de mental clutter – malgré mes efforts. Trop de contradictions, trop d’angoisses, trop d’attentes, trop de petites tâches à accomplir restées en suspens. Je ne sentais pas que la page était assez blanche.

Puis, je me suis rappelé ma dernière conversation avec Myriam – alors qu’on jasait de ce qu’on voulait vous dire en ce début d’année. Elle qui avait travaillé en RH ces dernières années a commencé l’année en congé maternité pour la finir dans une agence de publicité : «Trop souvent, les gens ont l’impression que ça prend un nouveau bacc ou une préparation incroyable pour changer de domaine. Ils voient ça comme quelque chose de vraiment gros de «recommencer» ailleurs. Ils utilisent des termes effrayants comme «réorientation professionnelle». Au fond, c’est une continuité. C’est un hiatus, une expérience, une exploration. On arrive quelque part avec le bagage qu’on a cumulé et qu’on continue de cumuler. Il n’y a pas de meilleur moment pour commencer ses démarches et essayer autre chose. Que ce soit l’entrepreneuriat, un nouveau domaine, un nouveau poste dans une même entreprise, une nouvelle discipline artistique à explorer. On peut faire de la place, mais la page n’est jamais blanche. Ni le premier janvier ni le premier septembre. Ni jamais.»

J’ai fermé mon application. La nouvelle année n’est donc pas une page blanche, une invitation à tout effacer et à recommencer. Ce n’est pas une nouvelle chance d’être une nouvelle personne, avec une nouvelle vie, une nouvelle productivité ou créativité exemplaire. C’est une image qui nous fait du bien, mais ce n’est pas la réalité. Certes, ça peut être un bon moment pour faire le point, identifier ses priorités, s’ajuster pour mieux continuer notre chemin.

Il y aura des restes de 2016 dans 2017. Des vieux patterns, des pensées noires, des occasions manquées, des délais allongés, des entraînements manqués, des mauvaises habitudes récalcitrantes.  

Comme de fait, je ne me sentais pas vraiment plus prête le 1er janvier, ni le 3, ni même le 6. Alors j’ai décidé que j’allais prendre l’énergie que j’utilisais pour faire du ménage dans ma tête et planifier-replanifier-et-planifier encore mon mois de janvier idéal et la transformer en énergie créatrice.

La canaliser vers ce qui me tient à coeur. Commencer à écrire mon billet, planifier des rencontres, sortir mon appareil photo, aller en ski de fond avec mon chum. Permettre. Dans les deux sens.

Prête pas prête, 2017, elle, est déjà commencée.
On y va!

Crédits image : Myriam Des Cormiers