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À mes 715 amis, je vous quitte!

Que celui qui n’a jamais passé plusieurs heures sur Facebook à naviguer d’un mur à l’autre pour en émerger yeux rougis par la lumière de son ordinateur, le cerveau en compote et la culpabilité d’avoir perdu son temps me jette la première pierre. C’est un euphémisme de dire que les réseaux sociaux bouffent une quantité énorme de notre temps (précieux) et que nous y sommes plus accros qu’on voudrait bien l’admettre.

En 10 ans, Mark Zuckerberg a réussi à nous faire croire que son invention nous était indispensable pour avoir une vie sociale, échanger nos idées et être au fait de l’actualité. On faisait comment avant au juste? Début de réponse avec Dan et Elena, qui ont commis ce qui semble relever de l’impossible pour la plupart d’entre nous : se déconnecter de Facebook, définitivement pour lui et pendant presque quatre ans pour elle.

Elena se rappelle encore pourquoi elle a quitté le réseau en 2012. Depuis quelque temps déjà, elle ressentait une lassitude à voir le défilement de la vie de ses amis virtuels et surtout une envie, celle d’avoir une vie aussi excitante que la leur. Mais le véritable moment décisif arrive quand elle apprend le décès de la mère d’une amie proche… quelques mois après l’événement. «Je suivais pourtant les actualités de cette fille sur Facebook, tout semblait bien aller, alors quand j’ai appris la nouvelle, ça a marqué un tournant. J’ai réalisé que je voulais avoir des rapports sincères et vrais avec les gens, ne plus avoir l’illusion de garder contact avec quelqu’un alors qu’on n’a en fait aucune interaction.»

Dan ferme quant à lui son profil personnel en 2014. Sans y être accro, il utilisait tout de même Facebook de manière quotidienne. Les raisons qui le poussent à faire la coupure sont tout autres notamment cette étude, qui le bouleverse, qui révèle l’impact émotionnel que les publications positives ou négatives de nos amis peuvent avoir sur nous sans que soit nécessaire un contact ou un échange direct avec cette personne. Dan ne souhaite pas subir cette manipulation, ni d’ailleurs voir ses données personnelles vendues à des compagnies ou ses opinions politiques influencées, il quitte donc sans regarder en arrière.

«Le plus dur, c’est finalement de prendre la décision de le faire. Ensuite, tu réalises que tu peux continuer à parler aux gens, à leur écrire des courriels, à les texter et les voir en face à face! Facebook est tout simplement un outil de communication de masse qui se fait passer pour un outil de communication personnalisé». Effectivement, Facebook nous bombarde de publicités spécialement choisies pour nous par un algorithme mystérieux et nos amis font leur propre marketing personnel de leur vie en étalant leurs photos de vacances, de repas et de moments joyeux dans un décor digne de Pinterest. Difficile de ne pas être influencé d’une manière ou d’une autre par ce trop-plein d’information qui nous amène à nous comparer, à envier et à faire des choix plus ou moins conscients.

Le jeune homme de 28 ans a l’impression qu’il a repris contrôle de son pouvoir décisionnel démocratique et plus de pouvoir maintenant décider de qui il veut prendre des nouvelles.

«Est-ce nécessaire d’avoir une communication quotidienne et instantanée avec toutes nos connaissances?» s’interroge-t-il. Non, probablement pas, surtout quand on réalise que ces communications deviennent de plus en plus superficielles et se résument à un échange de «like» et d’émojis divers.  

Elena aussi a eu l’impression de prendre de nouveau de «vraies nouvelles» en quittant le réseau. «J’appelais mes amies, j’entendais leur voix et je pouvais sentir quand quelque chose n’allait pas.» Et elle concède aussi que, «de toute façon, dans la vraie vie, on ne peut pas être proche de 25 personnes». Cette coupure l’a donc éloignée de certaines personnes, mais en renforçant ses amitiés avec celles et ceux qu’elle voyait IRL.

Aujourd’hui, après un déménagement au Ghana, elle est de retour sur Facebook, pour donner des nouvelles à des proches curieux ou inquiets et témoigner de sa nouvelle vie. Est-elle en paix avec sa nouvelle utilisation du réseau? «Ouf… moyennement», avoue-t-elle. «Pour l’instant, j’utilise pas mal les logiciels qui bloquent ton accès pour quelques heures afin de ne pas y perdre trop de temps. J’ai besoin de me discipliner» concède-t-elle.

Essayez- les vous aussi, ces logiciels qui contrôlent votre utilisation des RS : vous aurez un aperçu de votre vie sans Facebook, une vie où vous avez plus de temps, où vous vivez et faites des trucs pour vous et non pour les exposer ensuite à tous vos amis et où vous n’attendez plus l’approbation générale en publiant des statuts bien sentis (je suis tout aussi «coupable» que vous!). Après tout, tous ceux qui rompent avec le réseau sont unanimes : «Ça fait un bien fou!»

Pour aller plus loin sur le sujet : 

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